Abstract :
[fr] Un ordinateur est un objet physique effectuant des opérations logiques, il a donc nécessairement besoin d’un substrat physique pour faire ces opérations.
Aussi, si la théorie qui sous-tend l’informatique doit beaucoup aux mathématiciens (Turing pour n’en citer qu’un), c’est la physique qui a rendu la réalisation concrète des ordinateurs possible, qu’ils soient réalisés avec des relais électromécaniques, des tubes électroniques ou des transistors. Et cela ne s’arrête pas là : par exemple, d’une part la miniaturisation de ces derniers dans les processeurs fait que les phénomènes quantiques doivent être pris en compte (les électrons risquent de passer d’un fil à un autre par effet tunnel), d’autre part l’accroissement de la vitesse d’horloge rend concrète la barrière qu’est la vitesse de la
lumière.
Si les ordinateurs ne sont possibles qu’avec une théorie physique suffisamment évoluée, il y a une rétroaction qui se crée, car la physique a beaucoup bénéficié du développement des ordinateurs. Ceux-ci rendent en effet possibles des calculs – d’abord numériques, mais également symboliques – qu’il serait difficile de faire « à la main », pour des questions de temps et « d’erreurs humaines ». Cette possibilité a ouvert la voie à des simulations dans pratiquement toutes les branches de la physique, et ces simulations ont à leur tour pratique-
ment créé de nouvelles branches, telle la théorie du chaos.
En 1982, Richard Feynman déplorait cependant que les simulations informatiques de processus quantiques ne fussent pas efficaces, et suggérait qu’elles pourraient être bien plus rapides si l’ordinateur était lui-même « quantique » [2].
Dans ce document, nous allons d’abord revenir (chapitre 1) sur ce point et expliquer ce que pourrait faire différemment un ordinateur « quantique ». Nous décrirons ensuite (chapitre 2) les bases théoriques du calcul quantique tel que pourrait le pratiquer un ordinateur de ce type. Nous verrons finalement (chapitre 3) avec l’exemple de l’algorithme de Shor et de la Tranformation de Fourier Quantique qu’au-delà des simulations de processus quantiques, un ordinateur quantique pourrait accélérer dramatiquement d’autres opérations. Nous conclurons sur quelques approches possibles pour la réalisation d’un ordinateur quantique et sur l’existence d’autres applications de la mécanique quantique liées à l’informatique et à la communication qui ne nécessitent pas forcément un tel ordinateur, ainsi que sur des aspects plus philosophiques du calcul quantique.