Abstract :
[en] Cette conférence a pour objet de rouvrir et d’explorer plusieurs dossiers concernant les relations entretenues entre les membres de la dynastie comtale des Luxembourg et le comté de Hainaut dans une période d’environ un siècle qui fut cruciale pour les deux principautés. En effet elle vit d’une part les comtes de Luxembourg s’affirmer dans le cadre régional de l’ancienne Lotharingie puis, à partir de la première décennie du XIVe siècle, à un niveau européen, avec l’accession d’Henri VII au trône d’Allemagne (en 1308) puis à l’empire (en 1312) ainsi que celle de son fils Jean au trône de Bohême (à partir de 1310). Le comté de Hainaut quant à lui forme à partir de 1299 une principauté composite, réunissant les comtés de Hainaut, de Hollande et de Zélande sous l’autorité du comte Jean d’Avesnes.
Ces relations entre les Luxembourg et les Avesnes sont d’ordre dynastique. En guise d’introduction, nous en retracerons les grandes lignes, initiées dans la première moitié du XIIIe siècle dans le double contexte de la rivalité entre les familles d’Avesnes et Dampierre et des prétentions des comtes luxembourgeois à l’héritage namurois d’Henri IV, et marquées à partir de 1264 par des unions entre d’une part le futur comte Henri VI de Luxembourg et Béatrice, fille de Baudouin d’Avesnes, et d’autre part entre Philippa, fille aînée d’Henri V de Luxembourg avec Jean, futur comte de Hainaut. Ces unions inaugureront des liens durables entre les deux familles.
Dans un second temps, nous nous efforcerons d’étudier l’évolution de ces relations sous le règne d’Henri VII, né à Valenciennes, puis de son fils Jean, roi de Bohême et comte de Luxembourg à partir de 1310 († 1346) avec les comtes Jean d’Avesnes († 1304), et ses successeurs Guillaume Ier († 1337) et Guillaume II († 1345) ainsi qu’avec leur parent Jean de Hainaut, seigneur de Beaumont († 1356). Ceci sous un angle politique, particulièrement dans les années 1332-1334 dans le cadre de l’alliance qui unit les deux comtes avec d’autres princes lotharingiens contre le duc de Brabant mais aussi plus généralement dans le contexte de l’opposition croissante entre France et Angleterre. Cependant, l’on s’attardera surtout sur la dimension patrimoniale vu que ces relations impliquent la création d’un fief luxembourgeois en Hainaut qui subsistera jusqu’au moins 1372. Nous en retracerons les vicissitudes illustrées par les actes conservés dans chartes et cartulaires hainuyers et luxembourgeois.
Enfin, nous allons nous concentrer sur la dimension économique et patrimoniale de ces possessions, documentée par une série de comptes, de recettes de revenus, pour la plupart inédits. Très riches, ces comptes constituent une véritable mine d’or dans une perspective d’histoire locale. Cependant, nous les aborderons sous un angle différent, celui de l’histoire documentaire et des (possibles) transferts culturels entre principautés, dans la mesure où de telles sources, abondantes en Hainaut, sont extrêmement rares avant le dernier quart du XIVe siècle dans le comté puis duché de Luxembourg. Leur étude complète celle des actes et nous renseigne aussi sur l’évolution des relations entre princes hainuyers et luxembourgeois.