L'Europe au miroir quasi-cristallin. Sur le besoin juridique du vertige littéraire

L’article prend comme point de départ l’anthropologie dogmatique du philosophe et historien du droit Pierre Legendre, et met en lumière les imbrications du droit et de la littérature, plus spécifiquement l’importance de la littérature pour la relation du sujet au droit. Un rôle central joue ici la logique de la représentation – qui s’avère essentielle pour assurer la validité du système juridique ainsi que l’adhésion du sujet aux données normatives d’un système culturel : Pour chaque culture il s’agit de créer une construction du face à face avec le monde, une représentation – textuelle et imaginaire – dans laquelle le sujet se reconnaît et à laquelle il peut croire. Allant au-delà de l’approche legendrienne, notre article posera l’hypothèse que c’est notamment le texte littéraire qui, grâce au pouvoir fictionnel inhérent à sa structure spéculaire, se montre capable de créer, d’affirmer ou de bouleverser un système représentationnel.
Ensuite, nous allons interroger l’hypothèse du lien représentationnel entre sujet et droit sous les conditions actuelles (mondialisation, multilinguisme, numérisation), avant d’examiner sa validité dans le contexte européen : Un système commun européen de représentation, existe-t-il véritablement ? Une littérature européenne pourrait-elle aider à le ressusciter ou bien à en construire un ? Et enfin, compte tenu de la diversité de langues et des nationalismes renaissants, à quoi pourrait ressembler une « littérature européenne »?
Dans le but d’esquisser une réponse à ces questions, l’article va examiner les données représentationnelles du système politico-juridico-culturel européen afin d’ensuite tracer les contours d’une littérature européenne et de déceler comment celle-ci pourrait contribuer à la mise en place d’un miroir commun de la communauté européenne.